Les différents types d’établissements pénitentiaires
Les quelque 80 000 détenus français sont répartis sur tout le territoire dans plus de 185 prisons différentes. Beaucoup d’entre elles sont des Maisons d’Arrêt, accueillant les prévenus en attente de jugement et les condamnés ayant de courtes peines ou de courts reliquats à purger. Il existe aussi des Centres Pénitentiaires, des Centres de Détention, des Maisons Centrales, des Centres de Semi-Liberté, etc. Alors quelles différences entre tous ces types de prisons ?
Surtout, au-delà des différents types d’établissements, il existe de grandes différences entre prisons : certaines sont très anciennes et vétustes, construites dans des châteaux ou d’anciens couvents. D’autres ont été construites récemment et appliquent les nouvelles normes en vigueur, parfois jugées trop sécuritaires et déshumanisantes. Certaines prisons sont intégrées au tissu urbain et accessibles en transport pour les les proches et la famille, tandis que les “prisons des champs” sont plus isolées.
Les différents types de prison en chiffres
Début 2023, la France compte 187 établissements pénitentiaires, dont 84 Maisons d’Arrêts (45% des établissements) ainsi que 53 Centres Pénitentiaires qui comptent eux-mêmes souvent un quartier maison d’arrêt.
Les CP concentrent près de 45% des détenus, ce qui indique que près d’un détenu sur deux est hébergé dans un établissement où des profils de détenus divers coexistent (comme des prévenus en attente de jugement en quartier maison d’arrêt et des longues peines en quartier centre de détention).
A eux deux, les MA et les CP hébergent plus de 80% des détenus en France. C’est dans ces deux types d’établissement que se concentrent tous les problèmes de surpopulation carcérale.
Les autres types d’établissements, comme les Centres de Détention ou les Maisons Centrales sont beaucoup moins nombreux et concernent moins de 20% des détenus.
Les spécificités de chaque type d'établissement pénitentiaire
Les Maisons d'Arrêt
Les Maisons d'Arrêt (MA dans le jargon pénitentiaire) sont prévues pour recevoir les quelque 20 000 prévenus en détention provisoire, c'est-à-dire non encore condamnés et présumés innocents (ces derniers ne figurent donc pas sur le graphique ci-contre). Les maisons d'arrêt reçoivent également des personnes condamnées dont la peine ou le reliquat de peine n'excède pas deux ans. Le graphique montre effectivement que la plupart des condamnés incarcérés en maison d'arrêt le sont pour des peines inférieures à un an.
Les Centres de détention
Un Centre de Détention (CD) est un établissement pour peines qui reçoit les détenus condamnés en général à plus de deux ans de prison mais qui présentent les meilleures perspectives de réinsertion sociale. En général, il s'agit de profils relativement "simples à gérer" pour l'administration pénitentiaire, par comparaison à ceux incarcérés en Maisons Centrales.
Les Maisons Centrales
Une Maison Centrale (MC) est un établissement pour peine qui reçoit les détenus les plus lourdement condamnés. Le régime de détention se concentre sur la sécurité : il s'agit d'éviter les violences et les évasions de la part de profils "lourds" (multi-récidivistes, liens avec le crime organisé ou le terrorisme...) qui sont détenus pour des peines souvent assez longues. Certaines détenus incarcérés en maison centrale le sont pour des peines moindres : il s'agit souvent de détenus particulièrement signalés (les DPS), nécessitant une sécurité accrue ou ayant déjà tenté de s'évader par exemple. On ne compte que 12 maisons centrales en France.
Les Centres Pénitentiaires
Un centre pénitentiaire (CP) est un établissement pour peine qui rassemble au moins deux quartiers pénitentiaires différents : par exemple une maison d'arrêt, un centre de détention et une maison centrale. Ceux-ci sont séparés dans différents bâtiments selon leur régime de détention. Le graphique ci-dessous montre bien que la répartition des peines de prison est équilibrée chez les détenus incarcérés en centre pénitentiaire. On compte aujourd'hui un peu plus de 50 centres pénitentiaires en France.
Les centres de semi liberté
Les centres de semi-liberté (CSL dans le jargon) hébergent des détenus en régime de semi liberté, et désormais aussi en placement extérieur. Ces détenus bénéficient d'un aménagement de leur peine : ils peuvent ainsi quitter l'établissement pénitentiaire dans la journée, pour des activités ayant pour objectif une réinsertion (travail, formation, soins...) et dorment chaque nuit au sein de l'établissement pénitentiaire.
Les établissements pénitentiaires pour mineurs
Les établissements pour mineurs (EPM) accueillent les détenus n'ayant pas encore atteint l'âge de dix-huit ans. Les conditions de détention sont très différentes dans les 6 EPM français : il s'agit de petits établissements, avec un encadrement et un accompagnement très renforcés par rapport aux prisons pour adultes. On compte environ 700 détenus mineurs, dont environ la moitié sont détenus dans des EPM tandis que les autres sont dans des "quartiers mineurs" de prisons classiques.
Les unités hospitalières
Au-delà des petites infirmeries (ou unités sanitaires) présentes dans chaque établissement, il existe deux types d'unités hospitalières avec des moyens plus conséquents : les unités hospitalières spécialement aménagées, qui reçoivent les hospitalisations psychiatriques (UHSA) et les unités hospitalières sécurisées interrégionales pour des hospitalisations programmées dont la durée dépasse les 48h (UHSI).
De quand datent les prisons françaises ?
En France, les prisons sont parfois très modernes, mais parfois très anciennes aussi. Ainsi, la prison "moyenne" a été construite au milieu des années 1940.
La carte ci-contre présente les dates de construction (ou de conversion du bâtiment d'origine en prison) des établissements pénitentiaires français, pour la France métropolitaine. Les prisons les plus anciennes encore en fonctionnement datent d'avant le XIXème siècle. La maison d'arrêt de Gap date par exemple de 1790.
La date de construction d'un établissement n'est pas anodine pour cerner les disparités pouvant exister dans les prisons françaises. Une prison construite au XIXème siècle ou avant est souvent, de fait, plus frappée par des enjeux de vétusté. C'est le cas de la maison d'arrêt de Colmar, aménagée en prison en 1791 dans un bâtiment datant du XIVème siècle. La construction ne permet pas de séparer les détenus, en fonction de leur peine, ou encore de les isoler par mesure de sécurité. L'établissement, frappé par des soucis de surpopulation et de manque d'hygiène, ferme ses portes en 2021.
Une date ancienne de construction (ou d'aménagement du bâtiment) a néanmoins souvent un avantage en termes de localisation : les vieux établissements pénitentiaires sont souvent construits proches des centres villes, voire même adjacents aux tribunaux. L'accès à l'établissement pour les visiteurs est donc facilité. Les prisons datant du XXème ou du XXIème siècle sont souvent construites à l'écart du centre-ville, en marge sociale et géographique de la commune la plus proche. Enfin, une prison ancienne accueille souvent un nombre de détenus réduit, ce qui peut constituer un avantage vis-à-vis des nouveaux centres pénitentiaires très grands et parfois très automatisés et déshumanisants.
La prison de la Santé, à Paris, date de 1967. Elle présentait l'avantage important de se retrouver dans le centre ville de Paris, mais l'inconvénient de la vétusté. Elle a été fermée pendant quatre ans pour rénovation avant de réouvrir ses portes en janvier 2019.
Le centre pénitentiaire de Mont-de-Marsan a été inauguré en 2009. Il est prévu pour accueillir près de 700 détenus.
La localisation : "prisons des villes" contre "prisons des champs"
En France, le système pénitentiaire a longtemps été basé sur des prisons situées en centre-ville ou proches de grandes villes. Pour autant, les prisons se sont peu à peu éloignées voire isolées des grands centres urbains, notamment du fait de la disponibilité des terrains. En dehors des zones rurales, ceux-ci sont chers et font souvent l'objet d'oppositions des riverains.
Cette nouvelle géographie des prisons génère un isolement plus grand des détenus, voire des personnels. De plus, les choix d'affectation des détenus dans un établissement pénitentiaire plutôt qu'un autre répond à plusieurs contraintes (en particulier la nature de la détention, la durée de la peine, et le nombre de places disponibles) qui peuvent éloigner les détenus de leur lieu de résidence.
En conséquence, un détenu peut être incarcéré loin de sa famille : c'est particulièrement le cas des femmes et des mineurs, puisque les prisons adaptées sont peu nombreuses (quelques dizaines en France).
Etre incarcéré en Ile-de-France, dans les Bouches-du-Rhône, ou dans le Pas-de-Calais...
Les cartes suivantes indiquent la distance et le temps nécessaires pour atteindre différents établissements pénitentiaires dans trois départements. Le temps de voyage est calculé en transport en commun, puisqu'on ne peut pas faire l'hypothèse que les familles et les proches de détenus disposent tous de voiture pour se rendre dans un établissement pénitentiaire. Les temps de trajet sont très variables selon l'établissement et la région.